« Trop de jeunes filles passent à côté de leur potentiel ou ne prennent pas d’initiatives parce qu’elles n’ont pas assez (ou pas du tout) confiance en elles-mêmes » me dit Yal-Dhalie au terme du Festival Libre d’Être moi auquel elle a activement participé pendant toute la journée. Une autre me dit qu’elle a préféré sécher un cours pour être présente à ce festival parce que son engagement envers d’autres jeunes filles de son âge est bien plus important. « Je peux me rattraper pour mon cours. Mais je ne sais pas si j’aurai d’autres occasions pour démontrer à mes camarades à quel point l’action, la prise d’initiatives et la réalisation de son potentiel sont importantes pour les jeunes filles ». Je suis déconcertée par le calme et la maturité de ces jeunes filles qui s’apprêtent à s’engager auprès d’autres jeunes filles de leurs établissements scolaires dans le but de les aider à casser ces mythes qui ramènent leur valeur à l’apparence physique ou à des stéréotypes.
En arrivant au festival ce matin-là, à l’Institution Sainte-Elizabeth, à Delmas, j’étais loin d’imaginer que cette expérience serait aussi émouvante. J’aidais mes coéquipiers rotariens à placer les bouteilles d’eau et de thé aromatisé offertes par notre sponsor, CBC ; il fallait également enregistrer les noms, l’établissement scolaire, l’âge et le numéro de téléphone d’une quarantaine de jeunes filles qui arrivaient, les unes plus timides que les autres. Quelques-unes, un peu plus ouvertes, acceptaient de prendre des photos avec l’encadrement Libre d’Être Moi ; mais la majorité s’était dirigée silencieusement vers la tente où allait se dérouler le lancement du festival. Après les propos de bienvenue prononcés par notre Sœur, PE Amina, que les jeunes guides appelaient Commissaire à la Formation, notre Président, Serge, prit la parole pour remercier l’Association Nationale des Guides d’Haïti de nous avoir associés à cette noble initiative. Tout de suite après, les groupes sont constitués afin de rejoindre les animatrices dans les salles qui avaient été prévues pour les ateliers.
Je me rendais d’un groupe à un autre pour prendre quelques photos, faire quelques vidéos afin de capturer les moments principaux de l’événement. Au lieu de quoi, c’est moi qui étais captivée par les réflexions de ces jeunes filles sur les causes du manque de confiance en soi et des moyens à leur portée pour vulgariser les actions possibles devant booster l’estime de soi et porter les jeunes filles à prendre plus d’initiatives… Les ateliers intitulés « la femme parfaite », « Construis-moi », « Racines du problème »et « Je rêve d’un monde… » se déroulaient avec une fluidité permettant de passer des observations à l’analyse du problème pour enfin formuler des solutions permettant aux jeunes filles de se métamorphoser en « Reines Libres ».
J’assistais donc aux témoignages de ces reines, la couronne sur la tête, pendant qu’elles affirmaient qu’elles allaient se réunir avec les jeunes filles de leurs écoles ou autres groupes respectifs pour les aider à rester elles-mêmes, authentiques, à abandonner l’utilisation de crèmes éclaircissantes ou les expressions comme « je suis trop grosse – ou trop maigre – pour m’amuser à la plage » et les encourager à prendre plus d’initiatives. Ces reines se sont même jurées qu’elles feraient tout pour aider les parents à changer les habitudes de juger que les « tèt grenn (cheveux crépus) » dévalorisent.
Ces jeunes filles sont reparties heureuses d’avoir participé à ces ateliers enrichissants, plus ouvertes et en fredonnant « Je ne suis pas comme toutes ces filles, Qu’on dévisage, qu’on déshabille, Moi j’ai des formes et des rondeurs, Ça sert à réchauffer les cœurs… Viser la Lune, Ça ne me fait pas peur… !! »
Je fredonne encore, le cœur avec elles, le sourire sur les lèvres et… le poing levé !